S’aimer dans l’autre monde : exorcismes numériques au Japon - Université Paris Nanterre Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2020

Loving Each Other in the Other World: Digital Exorcisms in Japan

S’aimer dans l’autre monde : exorcismes numériques au Japon

Résumé

In Japan, some video games (otome games) allow women to have a love affair in the other world. In these simulation games, the player's avatar is a young girl who is run over by a car and then wakes up in a nightmarish afterlife: a high school filled with souls in pain condemned to continue their studies and to gradually lose their personality and their memory, before disappearing. Some of the dead students rebel, adopting a behavior very similar to that of ghosts in the Noh plays. Ghosts refuse to let go and cling to their desires, unable to sever the ties that bind them to the phenomenal world. Making the love story close to an exorcism ritual, these simulation games confront the users with double-binds which, metaphorically, reproduce the contradictory injunctions which now prevail in contemporary Japanese society. Could it be that otome games serve as tools for renunciation? Introducing users into a simulated post-mortem environment, otome games seem to allow them to transpose onto a digital purgatory the social death they are faced with… while offering them the means to ward off this social “damnation”. Will the love of a dead person be able to save them?
Au Japon, certains jeux vidéos (appelés otome games) permettent aux femmes d’avoir une relation amoureuse dans l’autre monde. Dans ces jeux de simulation, l’avatar de la joueuse est une jeune fille qui se fait écraser par une voiture puis se réveille dans un au-delà de cauchemar : un lycée rempli d’âmes en peine condamnées à poursuivre leurs études, études au cours desquelles – progressivement – ces âmes perdent leur personnalité et leur mémoire, avant de disparaître. Certains étudiants morts se révoltent contre ce système de décérébration et reproduisent le comportement des fantômes qui, dans les pièces de nô, refusent de lâcher prise et s’accrochent à leurs désirs, incapables de couper les liens qui les enchaînent au monde phénoménal. Assimilant l’histoire d’amour à un rituel d’exorcisme, ces jeux de simulation confrontent les utilisatrices à des doubles-injonctions contradictoires qui, de façon métaphorique, reproduisent celles que la société contemporaine japonaise impose aux générations actuelles. Se pourrait-il que les otome games soient des outils au service d’une forme de renonciation ? Introduisant les utilisatrices dans un environnement post-mortem simulé, les jeux japonais semblent en effet leur permettre de transposer sur un purgatoire numérique la mort sociale à laquelle la société les condamne tout en leur offrant les moyens de conjurer cette forme de damnation. L’amour d'un mort pourra-t-il les sauver ?
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-03088846 , version 1 (27-12-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-03088846 , version 1

Citer

Agnès Giard. S’aimer dans l’autre monde : exorcismes numériques au Japon. Valérie Robin-Azevedo. [Im]matérialités de la mort, Editions CNRS, pp.119-126, 2020, 978-2-271-13134-8. ⟨hal-03088846⟩
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