Dans cette présentation, je m’interrogerai sur le statut du lecteur et sa fonction dans l’écriture, notamment dans un type d’écrits que je propose de désigner au moins provisoirement comme des écrits expositifs. Dans une première partie, je proposerai de parcourir l’éventail des rôles et fonctions qui peuvent être dévolus à l’autre dans le discours, selon qu’il est analysé comme interlocuteur, auditeur, destinataire, récepteur, co-énonciateur, etc. Il s’agira notamment d’examiner les différents statuts qui lui sont attribués dans certains des grands cadres théoriques qui se sont attachés à lui conférer une place dans la caractérisation du dire : théories de l’interaction, théories de l’énonciation, théories du dialogisme, théorie de l’audience notamment. Dans la deuxième partie je reviendrai sur ce qui est en jeu dans le processus d’écriture tel qu’il peut être mobilisé dans ce que l’on appelle l’écriture de haut niveau, écriture dont l’une des caractéristiques est qu’elle doive être orientée (plus que d’autres types d’écritures ?) sur le lecteur, et sur ce qu’il peut attendre et comprendre de ce qui s’écrit. Je me propose notamment de mettre en évidence trois ressorts qui me paraissent mis en oeuvre dans ce type d’écriture, regroupant à la fois des genres universitaires et des genres professionnels : l’inscription dans une tradition (qui tient lieu de norme mais peut être subvertie), l’implication dans la construction d’un savoir, l’adaptation à un lectorat de pairs. Dans la dernière partie enfin, je proposerai d’envisager la position du lecteur à partir d’une réflexion sur la notion de lecture dont je montrerai qu’elle renvoie à des pratiques différentes, sinon opposées, et à des agents qui ne sont pas nécessairement les mêmes. Cela me conduira à proposer une caractérisation des écrits expositifs comme des écrits dans lesquels c’est moins le lecteur (au sens de celui qui reçoit) qui règle l’écriture du texte, que le texte qui doit régler sa lecture.