Le "crédit" de l'époque moderne recouvre bien plus qu'un avance monétaire. Il permet à ses utilisateurs marchands de construire et de gérer des groupes à la structure complexe, capables de contrôler les échanges entre segments de marché, de protéger ceux-ci des intrusions extérieures, et d'en tirer des profits importants, à partir d'avantages comparatifs minimes magnifiés par l'usage systématique de l'information privilégiée et des pratiques de cartellisation. C'est ce qui est démontré grâce à un série d'études de cas de pratiques marchandes à Bordeaux, Boston et Philadelphie au XVIIIe siècle, en particulier grâce à l'analyse fine des pratiques de comptabilité en partie double. Ces outils de domination économique peuvent aussi s'appliquer aux premières entreprises mécanisées, dont la gestion ne relève donc pas —encore— du capitalisme industriel, comme l'illustre l'exemple de la "Boston Manufacturing Company" à Waltham, Massachusetts. Les cartels marchands construits sur le crédit se consolident grâce à une sanction l"égale qui s'affirme en "Common Law" aussi bien qu'en droit français à partir de 11700, et attenint son apogée avec les "corporations" du début du XIXe siècle.