Dans la gueule de l'espace
Résumé
La marche me permet de dialoguer avec l’espace traversé et perçu pour faire du paysage une œuvre. Pour y parvenir, je m’impose un mode opératoire qui consiste à me déplacer entre chaque prise de vue et à déclencher pour un même motif que je cadre, 6 ou 9 saisies sur le même négatif afin d’obtenir une image photographique. Un feuilleté temporel de la somme totale de toutes les mémoires et expériences vécues ici est rendu visible sur une seule image. De cette manière, en redoublant de multiples fois la prise de vue initiale, une partie de l’image se désintègre sur la pellicule avant de se concrétiser. Lors de la mise en scène, le prélèvement qui en résulte tente de superposer l’échelle temporelle géologique à l’échelle temporelle humaine. Plusieurs secondes ou minutes peuvent s’écouler entre chaque prise de vues. Ainsi, j’obtiens une oscillation du sujet photographié. J’assume pleinement l’indétermination qui en résulte, ce qui me permet de me concentrer sur le sujet de la nature impermanente appréhendée comme un corps vibratoire. Cet aléatoire provoque une tension qui évacue partiellement la saisie photographique comme « acte décisif » et brouille les données perceptives pour ouvrir l’horizon aux interprétations métaphysiques.