Il est d'innombrables façons de dire combien la tournure que prend le monde, sous la férule de ceux que nous-mêmes, collective et démocratiquement élisons, pigeons, est ignoble et mortifère-combien elle s'enfonce gaillardement dans ce qu'on peut concevoir de pire. Quelque champ de pensée ou de faits que l'on considère, on le voit vicié chaque fois davantage de loi en loi, depuis des décennies-pour autant que j'en juge. Au point qu'on en vient à se demander si quelque dieu mauvais n'orchestrerait pas ce massacre légalement avalisé. Mais on peut s'abstenir d'impliquer la métaphysique ou d'invoquer la transcendance. Les causes sont assez limpides, et ceux qui en tirent le plus goulûment parti sont aisés à connaître. La pensée complexe est en soi d'un inégalable secours, mais s'il s'agit de désigner certaines sources avérées du désastre, elle est un instrument bien plus puissant que ne le requiert la circonstance. On n'a pas besoin d'un tracteur pour déplacer une chaise, d'une centrale nucléaire pour trancher un citron. Les « en même temps » miment grossièrement un subtil nuancier du réel : ils sont au vrai duperie, poudre jetée aux yeux pour aveugler sur l'évidence : rien n'est fait, rien n'est tenté pour que vraiment cesse ou modère l'inique injustice arrogante destructrice. C'est même précisément l'inverse. Les premiers seront les premiers, et que les derniers se le disent. Ce qu'on leur donne à vainement espérer : qu'un peu tout petit peu ruisselle, de l'aberrant trop plein qui là-haut s'amoncelle. Il est des jours où je ne sais comment je tiens, de savoir-de ça voir. Ni surtout ne sais comment tiennent et se regardent au miroir les valets et les régisseurs de cette abomination. Car des enfants meurent qu'on pourrait aisément sauver. Des gens dorment dehors qu'on pourrait aisément loger. Des frères et des soeurs sont chassées qu'on pourrait aisément aider. Et nous laissons rogner sans cesse, et nous rognons nous-mêmes les ailes du désir qu'il en aille autrement, de crainte qu'on nous moque de n'avoir pas compris que There Is No Alternative. Écoliers tremblants encore et toujours que l'autorité nous fustige. Je ne sais trop pourquoi, si cela a un sens, et surtout une utilité quelconque. Mais ce que j'ai à dire, ici se dit en cadence d'octosyllabes. Au rythme d'un pas dansant : invitation à cheminer contre cette république du pas de l'oie. À vous parle, compains de galle...