Sur quelques théories de la représentation visuelle avant Kepler
Abstract
This article attempts to understand the extent to which, and the terms in which, it was possible to speak of sensory vision as a psychic representation before Johannes Kepler inaugurated the new optics in his famous Paralipomena ad Vitellionem (1604). The following argument is taken as a starting point: That it is only within this new paradigm, dissociating the physical process of vision from its psychic treatment, one can legitimately speak of vision as a mental construction or a representation. After examining this question in the light of several ancient and medieval theories, the article reaches a different conclusion. The question of vision as a mental representation dates as far back as Aristotle, conferring to the internal senses (phantasia, common sense) the major function in elaborating the content of perception. Additionally, some theories under neo-Platonic influence, such as those of Augustine or Avicenna, clearly conceive direct vision as a psychic representation. In Paralipomena ad Vitellionem, Kepler distinguishes optics as a physical science of light from the psychology of perception; but the latter has already a long history, as does the idea of vision as a mental representation.
La question posée dans cet article est de savoir dans quelle mesure et selon quels schémas il est possible de parler de la vision sensible comme d’une représentation psychique avant la nouvelle optique inaugurée par Johannes Kepler dans ses célèbres Paralipomena ad Vitellionem (1604). L’article part du point de vue suivant : c’est seulement à l’intérieur de ce nouveau paradigme, qui dissocie le processus physique de la vision de son traitement psychique, qu’il serait légitime de parler de la vision comme une construction mentale, comme une représentation. En examinant cette question à la lumière de plusieurs théories anciennes et médiévales, l’article aboutit à une conclusion différente. C’est depuis Aristote que la question de la vision comme représentation mentale est posée, du fait de la fonction majeure qui est conférée aux sens internes (phantasia, sens commun) dans l’élaboration du contenu de perception, et certaines théories sous influence néo-platonicienne, comme celles d’Augustin ou Avicenne, conçoivent clairement la vision directe comme une représentation psychique. Dans les Paralipomena ad Vitellionem, Kepler sépare l’optique comme science physique de la lumière de la psychologie de la perception ; mais cette dernière a déjà une longue histoire, tout comme l’idée de la vision comme représentation mentale.