Maître & disciple : les relais du savoir des premiers théoriciens à nos jours. Compte-rendu croisé des ouvrages de Névot, Aurélie (dir.), De l'un à l'autre. Maîtres et disciples (Paris, CNRS Éditions, 2013), et de Noacco, Cristina, Corinne Bonnet, Patrick Marot et Charalampos Orfanos (dir.), Figures du maître - De l'autorité à l'autonomie (Presses Universitaires de Rennes, coll."Interférence", 2013).
Résumé
Dresser un portrait de la figure du maître, dans sa relation complexe avec son disciple ou envisagé pour lui‐même (mais cela a‐t‐il un sens ?), pris dans sa gloire et dans ses parts d'ombre, voilà l'ambitieux projet que se sont fixés les deux ouvrages dont nous parlons ici. Perspectives épistémologiques. Figures du maître. De l'autorité à l'autonomie et De l'un à l'autre. Maîtres et disciples s'intéressent au sein d'une longue tradition de recherche à la relation maître‐disciple, à laquelle George Steiner, notamment, a consacré en 2003 un ouvrage dans lequel il dépeint ce qu'il nomme lui‐même "les merveilles de la transmission"... terme que reprend Aurélie Névot dans son excellente introduction à De l'un à l'autre. Selon celui‐ci, l'on peut distinguer trois configurations, trois modes topiques de transmission de l'un à l'autre : le premier trope est celui de la "destruction" du disciple par son maître, par l'usage excessif des pouvoirs à celui‐ci conférés par la confiance même de son disciple. La deuxième forme de ces relations, symétriquement, se conclut par la destruction du maître par le disciple ; ainsi Wagner éconduisant Faust, Heidegger ingrat à l'égard de Husserl. Toutefois c'est la troisième configuration qui domine les esprits aussi bien que ces deux recueils, celle d'un échange, d'"un éros fait de confiance réciproque et, en vérité, d'amour", lien topique incarné entre autres par Socrate et Alcibiade, Héloïse et Abélard, ou Arendt et Heidegger.