L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) présente l'adolescence en fonction d'une tranche d'âge (10-19 ans). Les recherches de Mead (1928) ou Lutte (1991) montrent que l'adolescence est une construction sociale. Dans le cas des filles pauvres en Haïti, on pourrait questionner son existence même. Ces filles passent-elles directement de l'enfance à l'âge adulte ? J'explique leur adultisation forcée par la maternité qui se présenterait comme un rite de passage de l'enfance à l'âge adulte. Il est donc important d'analyser le contexte d'évolution de ces jeunes filles, ainsi que les formes de parentalité ayant marqué leur histoire familiale et qu'elles risquent de reproduire. Dans ma thèse de doctorat (2015), j'ai analysé le récit de vie de différentes femmes haïtiennes, en utilisant notamment l'arbre généalogique. Parce qu'il aide à investiguer sur le passé et le présent, cet outil a permis à ces femmes, mères et grand-mères, de me raconter leur adolescence, ainsi que celle de leurs filles. Cet outil rend visible des souffrances dans la parentalité, une sexualité marquée par la peur d'aimer. Ces résultats rencontrent ceux que j'avais déjà analysés en 2006 dans un mémoire sur la sexualité des filles adolescentes de familles pauvres à Solino, quartier populaire de Port-au-Prince. Ma réflexion se fonde ainsi sur ces deux recherches et s'alimente de mon expérience professionnelle à la Fondation pour la santé de la reproduction et l'éducation familiale (FOSREF-Haïti, 2004-2005), de mes engagements de jeunesse dans la lutte pour la santé sexuelle, notamment avec le Volontariat pour le Développement d'Haïti (VDH, 1999-2000). Après un coup d'œil sur les risques de grossesse en Haïti, j'analyserai la paternité marquée par l'abandon et la forme de maternité qu'elle engendre. Enfin je regarderai les conséquences de tout cela sur la sexualité des adolescentes.